Au moins 12 journalistes, pour la plupart palestiniens, ont été tués au cours des dix derniers jours de conflit dans et autour de la bande de Gaza. Sherif Mansour, du Comité pour la protection des journalistes, affirme qu’il s’agit de l’un des bilans de morts les plus élevés pour les journalistes couvrant le conflit depuis 1992 et le qualifie aujourd’hui de « période la plus meurtrière pour les journalistes à Gaza ». Il rejoint La démocratie maintenant ! pour discuter du rôle du journalisme dans la lutte contre la désinformation en période de violence et contre la menace d’une censure généralisée de la part d’Israël et d’autres acteurs étatiques.
TRANSCRIPTION
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AMY GOODMAN : Au cours de la première semaine de combats à Gaza, le Comité pour la protection des journalistes rapporte qu’au moins 12 journalistes ont été tués. D’autres sont portés disparus et blessés.
Nous sommes désormais rejoints par Sherif Mansour, coordinateur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord du CPJ.
Bon retour à La démocratie maintenant !, Chérif. Au cours de ces dernières minutes, nous avons — nous avons entendu l’histoire d’Issam — nous dire ce que vous comprenez de ce qui est arrivé aux journalistes. Il se trouvait à la frontière israélo-libanaise. Israël dit qu’il étudie la question. Que se passe-t-il à Gaza ?
CHERIF MANSOUR : Eh bien, c’est la période la plus meurtrière pour les journalistes à Gaza. Il s’agit, selon nos calculs, de l’un des bilans les plus élevés pour les journalistes couvrant le conflit depuis 1992. Depuis 2001, nous avons récemment publié des articles sur 20 journalistes palestiniens qui ont été tués au fil des années couvrant les opérations de Tsahal. Beaucoup d’entre eux, 13, se trouvaient à Gaza avant le début de cette guerre. Mais à l’heure actuelle, nous avons affaire à au moins 10 journalistes palestiniens, pour la plupart des photojournalistes indépendants, qui ont relevé des défis et pris des risques démesurés afin de raconter ce qui se passe. Mais outre Issam, du Liban, au moins un ou deux journalistes israéliens ont été tués ou portés disparus depuis le début du raid, le 7 octobre. Gaza qui aurait été bombardée au cours de la semaine, au moins 48 environ. Beaucoup ont été blessés. Beaucoup ont perdu leur maison. Et beaucoup ne peuvent pas accéder au monde extérieur faute d’Internet.
AMY GOODMAN : Alors laissez-moi vous demander : quelles sont les lois et conventions internationales en vigueur pour protéger les journalistes et tenir les responsables de leurs assassinats ?
CHERIF MANSOUR : Eh bien, nous appelons Israël à enquêter immédiatement sur ce qui est arrivé à Issam et à ses six collègues blessés. Nous soutenons la plainte du Liban auprès de l’ONU pour qu’une enquête soit menée. Et nous appelons également le Brésil, qui préside cette semaine le Conseil de sécurité de l’ONU, à veiller à ce que la sécurité des journalistes soit incluse dans toutes les négociations diplomatiques.
AMY GOODMAN : Et laissez-moi vous demander : la semaine dernière, les journalistes arabes de la BBC Muhannad Tutunji et Haitham Abudiab auraient été arrêtés, agressés et détenus sous la menace d’une arme par la police israélienne à Tel Aviv. Que savez-vous de cette situation ?
CHERIF MANSOUR : Malheureusement, la censure est généralisée, et pas seulement sur la couverture de Gaza en Israël, et nous avons vu et rapporté de nombreux journalistes menacés en direct, y compris sur la chaîne Al Araby TV il y a quelques jours à peine. Et des journalistes nous ont dit avoir reçu des menaces, en plus de toute la désinformation qui a été diffusée pour justifier ces attaques contre ces journalistes. Et nous avons vu le gouvernement israélien prendre actuellement des décrets pour censurer et fermer les médias palestiniens et inciter même contre les journalistes israéliens qui, entre guillemets, « nuisent au moral national » pendant la guerre.
AMY GOODMAN : Et je voulais demander — vendredi, l’agence de presse américaine Semafor a rapporté, je cite : « MSNBC a tranquillement retiré trois de ses chaînes musulmanes de leur poste de présentateur depuis l’attaque du Hamas contre Israël samedi dernier, au milieu de la vague de sympathie de l’Amérique pour les victimes du terrorisme israélien. » L’article détaille comment Mehdi Hasan, Ayman Mohyeldin et Ali Velshi ont tous vu leurs rôles réduits au cours de la semaine dernière, même si tous trois possèdent l’une des connaissances les plus approfondies de la région au sein du réseau, a rapporté Semafor. Vos derniers commentaires à ce sujet ?
CHERIF MANSOUR : Eh bien, les journalistes doivent fournir un compte rendu précis et indépendant de ce qui se passe, y compris en temps de crise. Nous comptons sur eux pour que la désinformation que nous constatons n’alimente pas le conflit. Nous comptons sur eux pour connaître la motivation et l’implication de toutes les parties belligérantes. Et nous comptons sur eux pour dénoncer les risques de violations des droits humains ou de crimes de guerre. Nous appelons donc à la résilience absolue des journalistes et au soutien de leurs rédacteurs afin qu’ils puissent faire leur travail de manière équitable, sans censure.
AMY GOODMAN : Chérif Mansour, nous tenons à vous remercier infiniment d’être avec nous, coordinateur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord du Comité pour la protection des journalistes.
C’est tout pour notre émission. Un joyeux anniversaire à Juan González et Miguel Nogueira ! Je m’appelle Amy Goodman. Merci de vous joindre a nous.